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Direction de la SAS : C’est qui le patron ?

La gouvernance de la SAS est, comme on le sait, organisée par les statuts, la seule limite posée aux associés étant la désignation obligatoire d’un président.

Pour le reste, les associés sont libres (ou presque) d’organiser la direction. Ils peuvent donc, s’ils le souhaitent, désigner un directeur général et un directeur général délégué puisque l’article L227-6 alinéa 3 du Code de Commerce dispose :

« Les statuts peuvent prévoir les conditions dans lesquelles une ou plusieurs personnes autres que le président, portant le titre de directeur général ou de directeur général délégué, peuvent exercer les pouvoirs confiés à ce dernier par le présent article ».

Reste la question de l’opposabilité aux tiers des pouvoirs du directeur général lorsque les statuts prévoient sa désignation.

A dire vrai, les praticiens pensaient ce débat clos.

Dans un 1er temps, la jurisprudence conditionnait l’opposabilité de son pouvoir de représentation à la publicité de sa désignation au RCS (Cass. com., 14-12-2010, n° 09-71.712, société Design Sportswears, F-P+B ; Cass. com., 03-06-2008, n° 07-14.457, société Design Sportswears, F-D).

Les SAS (de mauvaise foi) s’étaient alors « amusés » à nier les engagements et contrats signés par leur DG, en invoquant le défaut de publicité de sa désignation au RCS.

C’est dans ces conditions que la Cour de Cassation avait mis (temporairement) un terme à ce « jeu ».Aux termes d’un arrêt du 9 juillet 2013 (Cass. com., 9 juillet 2013, n˚ 12-22.627, F-P+B).

Face à une SAS qui refusait d’honorer les engagements souscrits par son Directeur Général, la Cour de cassation avait alors affirmé : « Les tiers peuvent se prévaloir à l’égard d’une société par actions simplifiée des engagements pris pour le compte de cette dernière par une personne portant le titre de directeur général ou de directeur général délégué de la société ».

Depuis lors, on pensait la messe dite …

Que nenni puisque la Cour de Cassation y revient avec un arrêt du 25 mai 2022 (Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, 25 mai 2022, 20-21.460, Inédit).

L’opposabilité du pouvoir du directeur général conditionnée par les statuts

Dans cette affaire, un juge des libertés et de la détention a autorisé des agents de l’administration des douanes à procéder à des visites avec saisies dans des locaux et dépendances susceptibles d’être occupés par la SAS Upsolar Europe, afin de rechercher la preuve de l’infraction douanière d’importation sans déclaration de marchandises prohibées.

A l’occasion de cette opération, les douanes refusaient de notifier l’ordonnance du juge des libertés au directeur général présent, au motif qu’il n’était pas établi qu’il ait la qualité de représentant légal de la SAS. La société Upsolar a relevé appel de l’ordonnance d’autorisation et formé un recours contre le déroulement de la visite, effectuée le 1er septembre 2015.

La Cour d’appel déclarait alors irrégulières et nulles les opérations de visite et de saisie du 1er septembre 2015 au motif que le directeur général aurait dû être regardé comme « un représentant » de la SAS Upsolar Europe du seul fait qu’il avait la qualité de « directeur général », de ce fait, il aurait du recevoir notification de l’ordonnance du juge des libertés et de la détention.

L’administration des douanes formait un pourvoi en cassation.

C’est dans ces conditions que la Haute Cour jugeait, au visa de l’article L. 227-6 du code de commerce :

« En statuant ainsi, sans rechercher si les statuts de la société Upsolar prévoyaient qu’elle pouvait être représentée à l’égard des tiers par une personne ayant le titre de directeur général, le premier président a privé sa décision de base légale ».

Conclusion : les tiers peuvent se prévaloir du pouvoir de représentation de la personne portant le titre de directeur général, sans autre condition.

Mais la réciproque n’est pas vraie et la SAS ne peut opposer aux tiers, le pouvoir de représentation légale de ce dernier qu’à la condition d’en justifier à travers les statuts !